Sarah
Dès que la porte se ferme, la rumeur de la ville diminue et je me retrouve dans la bulle de l’objet-abri. Impressionnant ! Un cadre lumineux se reflète sur la vitre, on dirait une œuvre d’art contemporain. Une découpe lumineuse de la ville. Petit à petit, je prends possession de mon lieu de veille : d’intérieur et d’extérieur. Je me sens petite face au ciel et immense face à la ville. À gauche, le ciel est noir, menaçant, à droite, une belle percée de lumière, c’est presque manichéen. Je tente d’encourager la percée et j’entre dans la lutte. Le vent gronde et faut trembler le sol sous mes pieds. Est ce que les veilleurs de Phare aussi sentaient les vibrations du vent ou des vagues ? Les mouettes entrent dans le jeu. Il se met à pleuvoir au loin, et le vent se transforme en vagues. On n’est plus très loin de la mer. La ville est une immense mer que j’engage de protéger, de surveiller. Un vélo manque de se faire écraser. Il faut que j’accepte d’être impuissante à aider. Je me réconforte en me concentrant de nouveau sur la percée lumineuse que s’est déjà décalée bien à droite. Il y a tellement de vent que je peux imaginer, comme quand j’étais petite, que c’est l’objet-abri qui bouge et non les nuages. Ca y est, cette fois, je navigue ! Je continue de veiller sur la ville en toute discrétion. Ah, un passant me remarque, je ne suis pas si invisible que ça, finalement. Les mouettes tourbillonnent avec le vent, la pluie se déchaine vers la Défense mais mon petit coin de ciel résiste. L’autre côté de l’objet-abri est mouillé, incroyable, mon côté est sec. Je dois être à la proue du navire. Je prends confiance en moi, je me laisse aller et porter par le noir et toute la ville se retourne vers lui. C’est fou ! Les lumières s’allument, les gens rentrent chez eux, la ville se calme. je vois que j’ai veillé. Est-ce que les veilleurs de Phare s’ennuyaient ? Je ne sais pas mais en tout cas, j’avais presque trop à faire ! Merci pour ce voyage hors du temps !